Texte: David Moginier Photos: DR

PLUS DE 1000 ANS. Le domaine de Mont-sur-Rolle a beau porter un nom qui fait référence à la forêt de châtaigniers qui couvrait la région, le raisin y a sa place depuis l’an 996 selon les premiers documents. Un domaine qui est en grande forme pour son âge! Les premières pierres du château datent, elles, de 1177, mais l’édifice d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec cette première construction. Après plusieurs propriétaires au fil des siècles, c’est Arnold Schenk qui le reprend après-guerre et qui mettra vingt-cinq ans pour le mettre dans sa forme actuelle. L’ensemble élégant fait face au lac qui offre, avec les vignes, un panorama superbe. (Grande photo ci-dessus: Tony Heubi, le chef vigneron du château.)

 

UNE VOÛTE ET DES HOMMES. Il faut pénétrer dans la cave pour admirer une autre preuve de l’histoire. Sur sa voûte en effet, tous ceux qui y ont travaillé au fil du temps ont laissé leur nom à l’aide d’une bougie et de sa flamme: ces derniers ont ainsi tracé des dizaines et des dizaines de patronymes, d’initiales et de dates. C’est ici, dans de grands foudres de bois (des tonneaux), que sont élevés les vins du domaine. En particulier le chasselas qui fait sa réputation. Un chasselas qui porte fièrement la mention de 1er Grand Cru, comme seule une vingtaine de chasselas vaudois, preuve d’une histoire, d’une qualité et d’un potentiel de garde.

Château de Châtagneréaz

La magnifique cave du Château de Châtagneréaz.

FAIT POUR DÉFIER LE TEMPS. Si le vin phare du château est déjà d’une belle qualité dans sa jeunesse, il se magnifie encore avec les années. Une qualité que met désormais en avant Philippe Schenk, régisseur du domaine familial: «il y a bien sûr des connaisseurs et des passionnés qui apprécient les vieux chasselas. Mais nous aimons aussi faire déguster des vieux millésimes à ceux qui ne les connaissent pas et qui vont découvrir des vins qui gagnent en complexité, en dimension aromatique.» Grâce à une belle collection entamée dans les années 2000, le Château de Châtagneréaz vend trois coffrets qui permettent d’apprécier la garde de ses vins.

 

RESPECTER LA NATURE. Le domaine a entrepris sa reconversion en bio il y a quelques années, et sera désormais labellisé avec le millésime 2023. Tony Heubi, le chef vigneron, fait ses expériences et a beaucoup appris: «Il y a encore quelques années, les 13 hectares de chasselas étaient plantés en haute densité, surtout à une époque où le climat n’était pas celui d’aujourd’hui et où ce type de culture basse amenait davantage de maturité et donc de qualité au raisin. Aujourd’hui, avec le changement climatique et le passage au bio, nous adaptons nos modes de culture et modernisons nos parcelles au fur et à mesure des nouvelles plantations. Mais le passage au bio n’a pas altéré la qualité du vin, au contraire.»

Château de Châtagneréaz

Un chasselas, un gamay et un viognier: tous sont merveilleusement produits.

TERROIR DIVERSIFIÉ. Même si le chasselas est planté sur une parcelle d’un seul tenant autour du château, les micro-parcelles sont assez différentes selon leur sol et leur climat. «La topographie est intéressante avec des expositions différentes sur une terre très argileuse, gage de race et d’élégance», raconte Philippe Schenk. La vendange, faite à la main, est ainsi vinifiée par lots qui permettent de comprendre chaque micro-terroir, avant que les vins soient assemblés. «Certaines parcelles se comportent mieux qu’il y a quelques décennies, d’autres un peu moins bien, avec le changement climatique», analyse Tony Heubi.

 

MAIS AUSSI. Le Château de Châtagneréaz cultive également un gamay d’Arcenant: une variété peu productive qui permet à ce cépage d’affirmer toutes ses qualités qu’on trouve moins quand il produit trop de raisins. Et, depuis 2009, un viognier, cépage rhodanien. «On dit toujours que nous sommes dans les hautes Côtes-du-Rhône, sourit Philippe Schenk, et cela se confirme.» Ici, le vin ne fait pas de fermentation malolactique, pour conserver une belle fraîcheur face à un taux d’alcool un peu élevé. «Nous ne voulions pas d’un viognier un peu lourd et pâteux, comme il peut l’être parfois.»

 

LA VAGUE DE L’ŒNOTOURISME. Le 1er Grand Cru est vendu exclusivement en bouteilles, à des privés et des restaurateurs par le biais de revendeurs et de commerces. Une magnifique œnothèque créée en 2017 permet aussi d’accueillir de petits groupes et de nombreux évènements ouverts au public sont agendés durant toute l’année.

 

>> www.chatagnereaz.ch