Dans la famille Bessire, je demande… C'est une adresse fameuse pour ses poissons, mais aussi pour ceux qui la font vivre. Sis à Thônex, le Cigalon (17/20, une étoile Michelin) est une vraie adresse familiale depuis ses débuts il y a exactement 30 ans, comme le rappelle son chef, l’affable Jean-Marc Bessire. À l’origine, celui-ci était accompagné de son père, son beau-père et bien sûr de Corinne, son épouse et partenaire de toujours, qui gère avec maestria la salle et la sommellerie.

 

…Le fils! Cette tradition va se perpétuer avec leur fils Robin (grande photo ci-dessus), qui a rejoint ses parents il y a un an. Celui-ci confie n’avoir jamais envisagé d’autre métier que celui de cuisinier, «à part pâtissier peut-être», mais c’est finalement la liberté créative de la cuisine qui l’a convaincu. Après un apprentissage au Vieux Bois, le restaurant de l’Ecole hôtelière de Genève, Robin a écumé les grandes maisons: l'Hôtel de Ville de Crissier (19/20), la Maison Wenger au Noirmont (18/20), la Micheline (16/20) ou encore le restaurant d'un hôtel à Saint Barth, avant de rejoindre le Cigalon. Autant dire que le fils a bien étudié.

 

Cuisinier d'or. «Celui qui était mon second depuis 16 ans ayant voulu passer à autre chose, l’arrivée de Robin s’est imposée naturellement», raconte Jean-Marc Bessire. Travailleur acharné, Robin a aussi remporté, aux côtés de la Vaudoise Elodie Manesse, le titre de Cuisinier d'Or 2017: «Ce travail intense a été un déclic positif pour moi». 

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Robin travaille désormais avec ses deux parents, son père Jean-Marc chef de cuisine, et sa maman Corinne, sommelière et cheffe de salle. 

Une référence indiscutable. Le Cigalon est la référence des restaurants de poissons, avec 17 points depuis 28 ans, et une étoile Michelin depuis 29 ans. «C’est mon chef au Mövenpick qui m’a initié à la cuisine du poisson, explique Jean-Marc Bessire. C’est lui qui m’a envoyé à Bordeaux pour me former». Pas de plat signature au Cigalon, mais des découvertes au gré des arrivages. Le chef a cependant un «plat de cœur»: le bar rôti sur écailles, qu’il agrémente selon la saison et le retour du marché.

 

Passion poisson. Tourné vers l’avenir, Jean-Marc Bessire n’a pas ressenti le besoin d’en transmettre la recette à son fils pour le moment: «Les clients ne le réclament pas forcément. Et finalement, notre rôle en tant que chef, c’est aussi de leur faire découvrir d’autres créations». Robin reconnaît qu’il n’avait, au départ, pas d'affinité culinaire particulière pour le poisson. Mais c’est aujourd’hui ce qu’il préfère apprêter: «Un bon produit de la mer se suffit presque à lui-même, pas besoin de chichi».

 

De la Bretagne à la Norvège. La Suisse étant éloignée des côtes, le duo puise forcément ses inspirations au gré des voyages de chacun. Pour approfondir leurs connaissances, père et fils sont partis en Bretagne, à la rencontre de leurs fournisseurs. Un séjour en Norvège, dédié à la Saint-Jacques, est prévu pour bientôt. Cet été, de retour du Japon, Robin a enrichi la carte d’une nouvelle entrée conçue à partir d'un souvenir: un sashimi de sériole aux oignons confits au soja et gel au citron et gingembre qui est «déjà devenu un incontournable», confie fièrement Corinne, sa maman.

Bessire Cigalon

Jean-Marc Bessire s'est taillé une réputation avec ses plats de la mer, reconnus depuis 28 et 29 ans au GaultMillau et par Michelin. Ici, son bar rôti sur écailles.

Bessire Cigalon

Pour Jean-Marc, travailler avec son fils lui a redonné «un coup de fouet et une envie encore plus forte de bien faire». Et ce alors qu'il a l'âge de la retraite!

Poisson sans pression. Le chef Bessire est-il prêt à passer le flambeau? Ce n'est pas pour tout de suite. «Un jour, je m’arrêterai. J’ai atteint l’âge de la retraite, mais la présence de Robin en cuisine avec moi m’a redonné un coup de fouet et une envie encore plus forte de bien faire. Je suis vraiment heureux». Aux côtés de son père, qui lui laisse carte blanche, Robin s'occupe actuellement des entrées. «Comme les clients, nous découvrons sa cuisine, son style», raconte le père, des étoiles plein les yeux. Mais les parents tiennent à préciser qu’ils ne souhaitent pas mettre de pression à leur fils quant à la reprise du restaurant: «Une belle maison certes, mais aussi une énorme charge financière dont il faut avoir conscience», rappelle Corinne.

 

Rester fidèle. De son côté, Robin ne semble pas douter de reprendre un jour l’affaire: «Pas maintenant, tempère-t-il. Cette transmission se fera naturellement, rien ne presse». Reste à voir ce que diront alors les critiques «Je n’ai jamais travaillé sous la pression des guides. Bien sûr, je serais triste si ma note baissait, mais aujourd’hui, je sais ce que je propose», confie Jean-Marc Bessire. Robin, modeste mais serein, assure vouloir fidèle à la philosophie familiale: «Au fond, tant que nos clients sont satisfaits, c’est l’essentiel. Mais réussir à maintenir ce niveau ajouterait à ma fierté de poursuivre l'aventure». Pour l’instant, c’est ensemble et avec visiblement beaucoup de plaisir, que le trio travaille et s’épanouit.

 

Le restaurant Le Cigalon à Thônex