Texte: François Busson Photos: François Busson
Que représente le pain dans votre galaxie culinaire?
Je suis le dernier d’une famille de neuf enfants avec un père ouvrier mécanicien et une maman au foyer pour assurer la logistique d’une telle smala. On habitait Belleville en Beaujolais. Le rituel du pain était très précis. Le samedi matin, Papa allait acheter plusieurs gros pains chez un très bon boulanger et on les enveloppait soigneusement dans un linge pour en assurer la conservation jusqu'à la fin de la semaine. Ce qui restait à ce moment-là était utilisé pour faire du pain perdu. Chaque vendredi soir, c’était, pour mes frères et sœurs et moi, notre madeleine de Proust, un régal inoubliable! (Recette plus bas.)
Pourquoi avoir choisi d’être cuisinier?
La cuisine a toujours été pour moi une passion. On me raconte que, tout petit, j’ai appris les mathématiques en comptant les crêpes. Mon père cultivait un grand jardin potager où nous allions l’aider chaque samedi. Un de mes grands frères était cuisinier à Paris et, à chaque retour à la maison, il nous préparait des plats exquis. Tout particulièrement de merveilleux desserts comme le soufflé glacé au Grand Marnier, l’omelette norvégienne ou le nougat glacé aux fruits confits. Je passais naturellement tous mes retours de l’école dans la cuisine pour préparer des gâteaux au lieu de faire mes devoirs. Plus tard, j'ai abandonné le lycée, où j'allais devenir dessinateur industriel, pour entrer dans une école de cuisine à Lyon. La suite ne sera faite que de collaborations merveilleuses avec des chefs tous devenus Meilleurs Ouvriers de France: Georges Blanc à Vonnas, Claude Gervais à Lyon, Paul Koeberlé à Villars-les-Dombes, Joël Robuchon et Alain Ducasse à Paris, sans oublier Gaston Lenôtre à Plaisir.
Votre destination gastronomique préférée?
J’aime découvrir les cuisines des différents pays, mais il me reste des souvenirs plus intenses que d’autres. J’apprécie particulièrement la cuisine du soleil, celle que l’on ne trouve pas forcément sur les cartes des restaurants, où les produits le plus simplement travaillés vous procurent des émotions intenses. Je pense par exemple à une auberge près d’Oristano, en Sardaigne, où le chef Renzo Corona sublime les pâtes grâce à des herbes et à des légumes locaux accompagnés de poissons et de crustacés de la pêche du jour (www.darenzo.it).
Le repas qui vous a le plus marqué?
Il y a tellement de repas inoubliables qui me restent en mémoire, tellement de grands chefs dont j’ai dégusté une cuisine exceptionnelle, comme Frédéric Anton, Edgard Bovier, Georges Blanc, Alain Ducasse, Eric Frechon, Franck Giovannini, Emmanuel Renaut, Eric Ripert et le regretté Joël Robuchon. Mais s’il faut choisir le plat qui m’a le plus marqué, ce sont les lasagnes aux légumes confits que mon épouse me concocte soigneusement lors de chacun de mes anniversaires.
Votre recette pour séduire?
Pour ma famille et mes amis, j’aime cuisiner le poisson, souvent cuit entier au four accompagné de légumes de saison. Je l'assaisonne de gros sel gris, de poivre noir et je l'arrose d’un filet d’huile d’olive. J'ajoute quelques herbes fraîches et un jus de citron pour sublimer la sauce en fin de cuisson. Toute la délicatesse du plat tient à la juste cuisson du poisson, dont la chair doit rester encore nacrée.
Si vous sortez au restaurant, c’est où?
Aller au restaurant, c’est avant tout passer un bon moment en famille ou entre amis, mais aussi pour déguster ce que j’aime. Un joli plateau de fruits de mer ou un boudin aux pommes chez l’ami Edgard du Lausanne Palace me régalent parfaitement; ou un pigeon cuit à la broche au restaurant Le Raisin à Cully; à moins que je ne me rende au Tsalè des Paccots pour déguster une fondue. J’y croise souvent de grands chefs comme Frédy Girardet, ce qui n’est pas vraiment surprenant vu que les bonnes adresses attirent les mêmes fins gourmets.
La recette du pain perdu de Philippe Gobet (pour 4 pers.)
Ingrédients
- 4 tranches épaisses de gros pain (le pain de la veille est préférable)
- 2 gros œufs
- 2 dl de lait entier
- 5 c. s. d’huile d’arachide ou de tournesol
- 100 g de sucre (réserver une cuillère à soupe pour les œufs)
- 1 sachet de sucre vanillé
- 1 pointe de couteau de cannelle en poudre (facultatif)
- 1 pincée de sel fin
Préparation
- Verser le lait dans un plat et faire tremper les tranches de pain sur les deux faces.
- Casser les œufs dans un plat et les fouetter comme pour une omelette avec une cuillère de sucre et une pincée de sel fin.
- Tremper les tranches de pain mouillées au lait dans les œufs battus sur les deux faces.
- Chauffer une poêle assez large avec l’huile et faire dorer les tranches de pain gorgées d’œuf.
- Retirer et poser les tranches de pain dorées sur un papier absorbant.
- Mélanger le sucre, le sucre vanillé et la cannelle en poudre et saupoudrez copieusement les tranches de pain encore chaudes sur les deux faces.
Régalez-vous!