Texte: Siméon Calame | Photos: Salvatore Vinci
Relax, take it easy! Il attend ses convives dans le hall de l’hôtel Seidenhof, à deux pas de la Bahnhofstrasse, en baskets, pantalon kaki et chemise blanche en lin. Décontracté et tout sourire, le chef Laurent Eperon envoie un signal fort: ce weekend, on se détend et on s’amuse! Alerte spoiler: l’état d’esprit restera le même chez les dix hôtes jusqu’au départ dimanche après-midi. Car c’est le weekend dernier que le GaultMillau et Zürich Tourisme ont emmené dix épicuriens à la découverte de cette ville pleine de charme. Faire découvrir d’authentiques spots secrets et gourmands, «c’est la mission qui m’a été confiée», écrit à la main l’ancien chef du Baur au Lac (18/20) dans un petit mot adressé à chaque convive dans sa chambre.
Une table admirable. Premier arrêt avant le repas de midi, le Lindenhof, un charmant petit parc offrant une vue imprenable sur la Limmat et la vieille-ville. «Sur l’immeuble à droite du clocher se trouve le plus petit appartement de la ville», sourit Laurent en pointant du doigt une minuscule cabane en haut d’une bâtisse. Et voilà qu’en suivant les petites «Gasse» (ruelles), on arrive au Rechberg 1837, un restaurant à l’élégante décoration et aux valeurs culinaires modernes. Ici, le chef Andi Bolliger joue de créativité pour sublimer les légumes locaux, les poissons du lac et les produits laitiers de la région. La sommelière Lara Cafiero, au français parfait, sert des verres de vins naturels, alors que l’on croque avec appétit dans une raviole à la sardine des Alpes relevée d’une épatante crème au maïs. Tandis que le dessert au lait de chèvre, à l’avoine et à la coriandre fait l’unanimité, on aperçoit par la fenêtre une petite chienne au poil bouclé et à l’air déterminé. «Grüezi, Emma!»
«Emma, wo ist der Trüffel?» Au bout de la laisse se trouve le sémillant Thierry Garzotto. Cet auteur, cuisinier et artiste est aussi… chasseur de truffe! Et son terrain de chasse est singulier: à quatre heures du matin, c’est au bord du lac de Zurich et dans les parcs de la métropole que l’homme au sac à dos clouté déniche le fameux or noir que tous les cuisiniers s’arrachent. Emma fait craquer Whitney Toyloy, Miss Suisse 2008: présente lors du weekend et qui la félicite à chaque fois qu’elle trouve une truffe. Quatre en moins de deux heures de promenade sur la Seepromenade. A la fin, chacun reçoit un petit pot de sel aux truffes et se met en marche pour l’Igniv Bar by Caminada, à la Marktgasse. C’est ici qu’officie la «Barkeeper de l’année» 2022 au Swiss Bar Awards du magazine Barnews, Sarah Madritsch.
Le Lyôba dans une vieille usine. Dans un univers feutré très représentatif de l’univers Caminada, on apprécie le gin tonic et les sublimes bouchées apéritives. Ainsi cet œuf évidé et rempli d’un crémeux aux herbes, d’une légère mousse de pomme de terre et de mini-croûtons de pain. Le soir, c’est au Provisorium, une ancienne boulangerie réaménagée en espace de coworking artisanal sur plusieurs étages, que Laurent accueille ses hôtes pour un repas en cinq actes. Avec Jérôme Perler, ami et ancien collaborateur au Baur au Lac, le chef vaudois décline les produits zurichois. Le filet d’omble du lac, surmonté d’une saladine d’herbes «que l’on retrouve au bord des chemins en pleine ville», se déguste avec une vinaigrette à la fleur de sureau. Le tendrissime jarret de veau, coiffé d’un soyeux crémeux au topinambour, s’accompagne d’un merlot de la cave Landolt Weine. Alors qu’ils préparent le risotto aux blettes, sbrinz et truffe (oui, celles dénichées par Emma!), Laurent et Jérôme - qui lui est fribourgeois - entonnent un Lyôba qui leur vaudra une nuée d’applaudissements et une volée de rires. La soirée se termine avec le soufflé mythique du chef étoilé: cette fois-ci, il est au chocolat LaFlor, une petite chocolaterie qui transforme ses fèves de cacao dans les locaux adjacents.
«Afiyet olsun, mutlu pazarlar!» Ou, «bon appétit, bon dimanche!» en turc. En turc? Oui, comme le restaurant Gül (15/20), où les dix convives brunchent le dimanche matin. Dans cette cour intérieure où les arbustes donnent de l’ombre aux meubles métalliques, on admire les cuisiniers au travail. Et on s’émerveille de voir la table se couvrir de petites assiettes: courge confite, pidés au fromage de chèvre, œufs pochés, cerises, double crème caramélisée, pains au sésame, miel turc, poivrons rôtis, œufs brouillés au salami turc piquant… Ce brunch complète à merveille notre weekend gastronomique zurichois. Mais il reste tellement de belles et bonnes choses à découvrir sur les bords de la Limmat qu’on se réjouit de revenir durant l’automne, ou le weekend prochain, pour vivre 24 heures avec une autre cheffe de talent, Alex Marmaziu, spécialiste de la cuisine végétale.
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