On s’y sent bien! En passant à côté de cette tour historique en pierres brutes, on a de la peine à imaginer un restaurant. Mais une fois traversée la terrasse, on est happé par un décor de pierre et de béton lavé vert olive, où un mobilier élégant et moderne donne la réplique à une armoire à vins vintage. Puis, les serveurs à l’accent chantant déclament une liste de vins arrivant directement de la Botte. La carte, elle, rappelle les plages italiennes et les ruelles transalpines. Et les prix ne sont pas surfaits: moins de cent francs pour le menu de sept plats.
Le petit frère de La Dispensa. Sous l'œil attentif de Pina Gioia, la gérante de la Dispensa (14/20) à Neuchâtel, la Tour s'est refait une beauté en 2022. La rayonnante entrepreneuse sait où elle va: elle a recruté un chef, Gennaro Rotella, qui a placé la Tour sur la carte gastronomique romande. Au menu, des amuse-bouches bruts mais excellents: ah, cette divine pâte frite croustillante coiffée d’une intense crème de burrata à l’algue kombu! Puis, le vitello tonnato est inversé: les lamelles de thon cru sont alignées et le veau arrive en sauce dressée en petits points rectangles de céleri et de petits biscuits moelleux au persil. Un tableau tout en finesse et en légèreté.
Inspiration artistique. La parmigiana, elle, est réinterprétée à l’horizontale et colorée: elle se déguste surmontée d’un frais gel au basilic, de gourmandes tomates cerises confites et d’un nuage de mousse à la scamorza fumée. Les habitués reconnaîtront le cousinage entre la Tour et la Dispensa, mais les dressages portent ici une signature bien définie. Le chef s’inspire de l’artiste russe Vassily Kandinsky et ses peintures abstraites. Ainsi, les «bougies» farcies à la joue de bœuf reposent sur un mariage débridé de compotée de poivron jaune et d’une chiche sauce au basilic. La sauce à la burrata ajoute de la douceur à un plat déjà plutôt suave. La poudre de céleri est rigolote et fond sous la langue.
Cuissons maîtrisées. Ensuite, on rage de ne pas trouver plus de farce à la joue de bœuf dans ces ravioles à la maîtrise impeccable et aux saveurs puissantes. Une émulsion au fromage, au pecorino, cette fois-ci, s’unit à un fin jus de veau, que l’on n’hésite pas à saucer avec les ravioles. Le filet mignon de porc cuit à basse température arrive en cuisson parfaite. Son feuilleté cubique de pomme de terre parfaitement assaisonné croustille, tandis que le jus au romarin corse le plat. L’artichaut rôti? Pas indispensable, il apporte une texture différente. Mais le point faible, c'est le sucré. Le cube de mousse au chocolat blanc et son sorbet à la mangue sont trop sucrés, les perles de fruit de la Passion glissées dans un minuscule fond de tarte éclatent en bouche sans arriver à s’imposer alors que le gel à la mangue rehausse le tout par sa vivifiante acidité. Cela dit, dessert mis de côté, ce restaurant mérite d’y faire un Tour! À savoir que depuis le 5 mai, c'est Gerardo Metta, chef de La Dispensa, qui signera aussi les menus de la Tour.