Sans concessions. Tels des prestidigitateurs, certains chefs volent d’un festival culinaire à l’autre. D’autres ne s’aventurent pas hors de leur cuisine. Didier de Courten (en photo ci-dessus avec Frank Oerthle) fait clairement partie de la deuxième catégorie. En effet, quand il s’agit de qualité, le chef n’accepte aucun compromis. Pourtant reconnu comme l’un des meilleurs chefs de Suisse (19 points et 2 étoiles), Didier de Courten reste méconnu en dehors des habitués du Valais.
Apparitions rarissimes. «Ma cuisine s’exporte difficilement, du coup, je ne le fais que très rarement», explique-t-il. Il a pourtant fait l’une de ses rares exceptions en apparaissant à l’Arté, le restaurant de Frank Oerthle (16 points, 1 étoile) les pieds dans le lac de Lugano. En ouverture du festival gastronomique annuel San Pellegrino Sapori Ticino. «J’ai attendu si longtemps avant qu’il accepte que j’aurais presque tout fait pour que ça marche!» affirme Dany Stauffacher, le directeur du festival.
Star discrète. La seule présence de Didier de Courten a rendu la soirée exceptionnelle: «Le samedi, nous servions 58 hôtes à Sierre, le dimanche, nous nous sommes partis à 6h30 pour le Tessin», raconte le chef. Le matériel a été transporté à Lugano par un pick-up doublé d’une camionnette frigorifique spécialement louée pour l’occasion. Le chef a même amené ses couverts!
5 truites de 3,5 kilos. Morilles claires et foncées, asperges du Valais, canard de Challans, fraises gariguettes et impressionnantes truites saumonées du Léman pesant chacune entre 3 et 3,5 kilos, Didier de Courten a trié ses ingrédients sur le volet. Tout comme son équipe d’ailleurs, composée de 8 hommes et 2 femmes, avec 2 personnes en plus au service. Le chef a pratiquement emmené sa cuisine avec lui au Tessin. Mais pas tout à fait quand même, puisqu’à Sierre, ce sont 20 personnes qui oeuvrent chaque jour dans les cuisines du restaurant gastronomique et de la brasserie de l’Hôtel Terminus.
Parfait équilibre. C’est cette brigade qui est en fait à l’origine de la sortie exceptionnelle du chef De Courten : « Avec cette équipe, j’ai l’impression pour la première fois qu’il est possible de déplacer ma cuisine » se réjouit-il à la fin de la soirée, sous le tonnerre d’applaudissement des 70 hôtes présents. Deux heures plus tôt, une intense concentration se lisait sur le visage du chef dans l’assez petite cuisine de l’Arté, alors qu’il plongeait ses truites saumonées dans un beurre épicé. Tout juste saisies à température hautement contrôlée, elles seront ainsi parfaitement mi-cuites. Enrobées de sel et de poudre de betterave, puis servies sur assiette accompagnées de dés de mangues et d’une émulsion aux herbes, le plat est parfaitement équilibré.
Morilles, ris de veau et vin des glaciers. Didier de Courten ne parle peut-être pas beaucoup, mais ses plats remplacent les plus belles paroles. Le clou de la soirée: morilles, ris de veau glacé sur carré de chartreuse de légumes et sauce au vin des glacier. Il faut six personnes pour amener un plat sur la table. Comme le décrit le chef: «Ma cuisine est une cuisine de détail. On ne peut pas faire vite-vite.» Didier de Courten quittera sa cuisine une deuxième fois cette année lors de la Garden Party GaultMillau du 18 août au Grand Resort Bad Ragaz.