Texte: Daniel Böniger | Photos: Remy Steiner
Humanité. Une ferme et un restaurant gastronomique ne sont que rarrement aussi proches l'un de l'autre: le trajet ne dure que 15 minutes. S'y ajoute la connivence entre les couples Patrick Germann et Franziska Ilg, les tenanciers du Bären (L'Ours, 14/20) de Schwarzenburg (BE) et le duo de passionnées que sont Gaby et Fredy Zbinden Patrick Germann du domaine bio de Rüschegg.
Dessert irrésistible. Cette proximité ravit également les clients de l'auberge. Sous le signe du plaisir, l'entrée associe une terrine de veau et un filet de truite fumé (provenant d'un élevage bio proche) à des légumes colorés récoltés la veille. Ce plat léger s'appelle «vitello forello». Le chou-fleur, lui, arrive décliné en différentes textures, accompagné de mayonnaise au miso et d'un pesto de roquette remarquable. «Les fleurs comestibles utilisées pour la décoration proviennent également de la ferme des Zbinden.» En dessert, le festival de baies (jeu de mot en allemand entre Beeren, les petits fruits, et Bären, l'ours) est composé d'une glace au bois de cassis enrobée de chocolat Ruby, d'un muffin aux baies, d'un sorbet à la fraise et d'un croustillant au chocolat blanc!» Une création qui trahit que le Jeune Restaurateur Patrick Germann est également boulanger/pâtissier.
L'atout bio. 90% des légumes utilisés au Bären (14 points) proviennent de chez Gaby et Fredy Zbinden. «Dès le départ, nous voulions miser sur le bio - comme nous le faisons d'ailleurs aussi en privé. Et nous sommes tombés sur les Zbinden», raconte Patrick Germann. Gaby et Fredy sont venus déjeuner au restaurant au retour du marché où ils vendent leurs légumes le samedi. Quelques échanges plus tard, notre collaboration était lancée. Elle est d'autant plus judicieuse qu'ainsi aucun intermédiaire n'est nécessaire. «Ils n'hésitent pas à prendre parfois des légumes légèrement endommagés par la grêle», ajoute Fredy Zbinden. De quoi compenser le prix légèrement plus cher des légumes bio qui sont aussi «clairement meilleurs». À midi, le menu, soupe et salade comprises, ne coûte cependant que tout juste 20 francs.
Parlons biodiversité. Leur ferme, les Zbinden, l'appellent de «manufacture de légumes» et le bio y est intégré de manière particulièrement conséquente: «Nous semons à la main. Nous désherbons à la main. Nous récoltons à la main.» Dans la mesure du possible, ils renoncent aux produits phytosanitaires ainsi qu'aux outils lourds qui pourraient détruire la structure du sol. En fait, Fredy et Gaby Zbinden pensent en termes de biodiversité. Ainsi, devant la ferme se trouve une haie en bois entassé: elle sert de refuge aux souris et aux belettes. Autre exemple: au moment de rentrer le fourrage pour le bétail, les Zbinden laissent toujours une bande de trèfle en fleurs pour les abeilles: «Elles ont besoin de nectar!»
«Éleveur de vers!» Oui, les Zbinden ont les pieds sur terre, ils sont la quatrième génération à exploiter la ferme de Rüschegg: «Je suis tellement enraciné ici que j'arrive à peine à partir en vacances», plaisante Fredy. Son père s'est converti au bio dès 1979, et la ferme est inscrite au registre sous le numéro 290 - alors que la Suisse compte à présent 8000 exploitations bio. À l'école, ce fils de paysan a toutefois appris à ses dépens à quel point son père était en avance sur son temps. «On se moquait de moi en me traitant d'éleveur de vers!»
En attendant samedi. Nous l'avons dit, Gaby et Fredy Zbinden se rendent chaque semaine à Schwarzenburg pour le «Märit», le marché. Et ensuite, ils s'attablent au Bären pour le repas de midi où ils se voient servir leur propre récolte: «Nous ne mangeons que nos propres légumes à la maison, et Gaby cuisine bien», affirme Fredy Zbinden. «Malgré tout, nous nous réjouissons chaque samedi de nous arrêter chez Franziska et Pädu!» Cette joie est manifestement tout à fait réciproque.
Le label «Bio Cuisine» indique aux clients le niveau de durabilité qui les attend dans leur assiette. Il se décline en trois échelons symbolisés par une à trois fleurs, selon la part de produits bios ou estampillés bio bourgeon utilisés dans l'établissement. Le calcul se base sur la valeur d'achat des aliments et des boissons. GaultMillau Suisse soutient cette initiative.