Authenticité. «On cuisine vraiment comme là-bas, alors désolé si c'était un peu trop piquant», sourit Joey Uldry, un peu gênée. Là-bas, c'est en Thaïlande, pays d'origine de la jeune cheffe, qui a ouvert le restaurant The Joey Bangkok à Chessel, en décembre 2020. D'abord dans un petit foodtruck - d'ailleurs toujours garé à côté du restaurant -, puis entre les murs actuels. C'est dans ce petit village de la plaine du Rhône vaudoise que l'on s'est allègrement attablés un soir de printemps. Et il est vrai que la cuisine de Joey est vivante!

 

Un duo qui roule! «Je suis arrivée de Thaïlande avec des souvenirs d'enfance et une envie de partager ma culture thaïe, celle que m'a inculquée ma famille. Dans mon restaurant, je veux offrir une cuisine sincère, la même que celle que l'on déguste en Thaïlande. Avec tous ses reliefs!» À Chessel, c'est avec son compagnon Jean-Baptiste Munduteguy (dont les épicuriens se souviendront la cuisine aux Cerniers, aux Giettes) que Joey développe sa cuisine depuis janvier 2024. «Elle apporte les saveurs, moi la technique», sourit ce dernier. Car il faut le dire: Joey n'est pas cuisinière de métier.

The Joey Bangkok Chessel

Le jeu de textures du plateau d'entrées est superbe.

 
The Joey Bangkok Chessel

Le bœuf arrive tendre et barbote dans un bouillon gras et plein de saveurs.

 

Un stage marquant. À l'école hôtelière de Montreux, Joey se frotte au monde du management, puis à celui de la cuisine à travers deux stages qui l'ont décidée à se lancer en cuisine: à la Maison Manesse (16 points) et chez Gül (15 points), tous deux à Zurich. «Elif Oskan (ndlr: cheffe du restaurant Gül) m'a beaucoup marquée, raconte Joey. Sa manière de raconter des histoires et des voyages à travers sa cuisine est belle.» Celle de la cheffe thaïlandaise aussi. Et les clients ne s'y trompent pas: «trois quarts d'entre eux sont des habitués».

 

Fraîcheur et équilibre. «Influencée par les pays limitrophes et très différents d'une région à une autre, la cuisine thaïlandaise se caractérise notamment par l'équilibre et la fraîcheur, précise Joey. Au contraire de la française dans laquelle, par exemple, on va chercher à créer des croûtes à la viande et au poisson, grâce à du beurre ou d'autres matières grasses, nous cuisinons plutôt en infusions, avec le temps long.»

The Joey Bangkok Chessel

Le moelleux au chocolat et à la cacahuète sort du lot. Il n'est sucré qu'avec le praliné à l'arachide, et les saveurs ressortent davantage.

The Joey Bangkok Chessel

«En Thaïlande, on vit en famille complète, avec les grands-parents, et on est beaucoup à table. Alors, on cuisine beaucoup et on partage!»

Menu du midi. Ouvert du mercredi au samedi, midi et soir, The Joey Bangkok fait salle comble (20-24 couverts) à presque chaque service. Et à trois, avec une serveuse, la petite équipe cravache. À midi, place à des propositions simples (blanc de poulet sauce satay, crevettes au gingembre, aiguillettes de bœuf grillée au curry vert maison…), toujours bien assaisonnés et garnis de gourmandes sauces. Le soir, le menu dégustation (70 francs) développe quelques mises en bouche dont des nems croustillants, des beignets de crevette et sauce aigre-douce… puis, place aux plats à partager.

 

Festival de saveurs. «Lorsque je suis arrivée en Suisse, j'ai été choquée qu'à table, ce soit chacun son plat, reprend Joey. Chez nous, il y a dix assiettes différentes sur la table et chacun se sert!» C'est ce que Jean-Baptiste et elle ont mis en place à Chessel. On se sert avec entrain de ce porc croustillant à la confiture de piment, de ce tendre bœuf et son bouillon gras corsé, de ces beignets de poulet ou encore de ce crabe en tempura. Des herbes plurielles ajoutent goûts et couleurs à ces recettes, tandis que le riz blanc (à volonté) permet de finir les délicieuses sauces. Un festival de saveurs!

 

The Joey Bangkok à Chessel

 

Photos: The Joey Bangkok, Siméon Calame