Texte: Siméon Calame | Photos: Christophe Voisin
Speakeasy de luxe. La soirée à la «Table du Vingt-Deux», à trois pas de la Place Centrale de Verbier, débute par un cocktail au «Crock No Name», le bar à l’ambiance décontractée et au mobilier vintage. C’est ici que le propriétaire Pierre-Jean Leclercq énonce le menu du soir. Un menu gastronomique en cinq plats que l’on ne s’attend pas à déguster sur une table basse, ni assis dans un fauteuil. Alors où? Derrière cette bibliothèque aux tons pastels, qui n’en est pas une! Il s’agit en fait de la porte d’accès à un deux-pièces avec cuisine ouverte: le restaurant. En cuisine: Thomas Vado, solide bonhomme au sourire éternel, se tient prêt à nous émerveiller.
(Grande image ci-dessus: langoustine, purée de céleri, gnocchis de céleri, poudre de café)
Hausse de niveau d’année en année. Les épicuriens connaissent son nom pour avoir déjà goûté sa cuisine au Eat Me (Lausanne), au Taratata (13/20, Verbier) ou ici-même, depuis l’année dernière. Auparavant, Thomas Vado avait fait ses armes au W (14/20, Verbier) et au Café Beau-Rivage (14/20, Lausanne). Cet hiver, ils sont deux dans ce petit espace, et ils font des merveilles. Ainsi ce précieux amuse-bouche, un tartare de St-Jacques à l’acidulée vinaigrette passion-yuzu, coiffé d’une rosace de radis et d’œufs de saumon. Puis, l’espuma de pomme de terre aux multiples textures est gourmand et camoufle pickles d’oignons rouges, lamelles de lard et petits morceaux de pomme de terre. Dommage de le servir froid…
Service détendu. Alors que l’on se laisse servir par Thibaut Pareilh Peyrou, sommelier au verbe engageant et émaillé d’un humour bien saisi, on ne peut s’empêcher de se délecter de ce pain de la boulangerie de la Poste et de ce beurre de la laiterie de Verbier, travaillé noisette et parfumé à la sauge… Quelles merveilles! Mais attention à ne pas en abuser, car voilà déjà le crémeux de topinambour, son mascarpone fouetté et sa râpée de truffe. Une chips du légume et quelques croûtons apportent du relief à cette entrée toute en gourmandise. Le maigre, lui, est légèrement trop cuit, alors que sa soyeuse mayonnaise à la livèche est une véritable bombe. Une délicate amertume enveloppe agréablement ce plat coloré. Puis vient le clou du spectacle…
Plat principal de référence. Ah, ce veau! Roulé dans une tranche de viande séchée et une feuille de chou, il présente une cuisson parfaite. La purée de champignons au cognac surprend d’audace et le jus de veau embaume. Quelques légumes glacés et un foie gras poêlé complètent un plat de grande classe. À ce stade, le passage par la case fromage est un dilemme. Mais on a raison de craquer pour cette sélection de la laiterie de Verbier. On salue enfin le dessert, ce mariage osé de chocolat blanc, panais et noix de coco, tout en textures. Si le niveau actuel se maintient, il y a de fortes chances que la Table du Vingt-Deux entre dans le prochain GaultMillau.
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