Photos: Julie de Tribolet & @redibex
Aigle. Au pied du château de conte de fées entouré de vignes, la Cave Alain Emery s’épanouit depuis 1840. Dans le pittoresque quartier du Cloître, donc, on accède au cœur de la maison par une courette pavée, abritée par un vieux platane. Puis il faut descendre quelques marches et pousser une lourde porte d’autrefois avant d’entrer. Un vrai décor de film! «Bonjour!» lance Alain, 42 ans, cinquième génération de la même famille à exploiter et à faire fleurir le domaine avec son frère Marc, 38 ans, postier reconverti à la vigne. Ensemble, dans ce cadre qui paraît immuable et où les portraits en noir et blanc de leurs ancêtres nous regardent, ils propulsent l’entreprise dans le futur. Parfois même en hélicoptère.
Envol. Entre les immenses fûts de chêne centenaires qui dorment dans la cave voûtée et les millésimes du troisième millénaire, il y a le lien de la tradition, bien sûr. Mais les deux frères complices et formés à la viticulture et à l’œnologie moderne y ajoutent aussi un savoir-faire au goût du jour. Et surtout une promotion avant-gardiste. Notamment en emmenant leurs clients (entreprises ou particuliers) faire un tour des Alpes en hélicoptère et en leur proposant une dégustation tout là-haut, sur le glacier des Diablerets. Magique!
La magie opère pour les clients, on s’en doute: «Les gens sont enthousiastes. Et cette activité fait aussi un excellent cadeau d’anniversaire ou de mariage. Du coup, certains arrivent et ne savent pas ce qui les attend. Comme cette dame à qui son mari avait juste demandé de mettre un pantalon et de bonnes chaussures... en plein été!» s’amuse Marc Emery, fier, par ailleurs, que la Cave Emery produise aussi le Vin officiel d’une des escadrilles des Forces Aériennes Suisses.
Œnotourisme. Leur approche créative et moderne a en outre valu aux frères Emery de remporter le Prix suisse de l’œnotourisme. Parce que, au-delà des vols en hélicoptère, ils ont développé d’autres animations. Comme ces escapades gourmandes organisées avec les transports publics du Chablais et qui comprennent une dégustation de vins et une planchette (dont on relèvera que le saucisson est une vraie délectation!). Ils ont même installé une chambre d’hôtes dans une petite annexe. Et leur pressoir sert volontiers de cadre à des réceptions.
Fidélité. Marc a développé la communication, essentielle à l’heure où les clients sont sollicités de toutes parts et sont donc moins fidèles: «Autrefois, les gens avaient un vigneron de famille, comme ils avaient un médecin de famille. Aujourd’hui, c’est un défi d’arriver à les faire revenir et d’en attirer de nouveaux.» Et pour cela, c’est bien sûr le vin qui demeure au centre des activités de la maison.
L’essentiel. Alain se plaît à commencer la semaine à la cave: «Je viens déguster tôt le matin. C’est ma manière de faire le point et de constater l’évolution de chaque cru», explique-t-il. C’est lui aussi qui veille sur les vignes réparties entre les alentours du château d’Aigle et les coteaux pentus qui dominent la ville. Des vignes que les deux frères bichonnent avec un recours croissant à la production intégrée et raisonnée. Avec succès aussi: les titres rempotés au Grand Prix du vin suisse, notamment, l’attestent.