Photos: Didier Martenet

Rien ne résiste à l’énergie créative du vigneron Philippe Bovet. Parti de rien en 2002, il produit aujourd’hui 70000 bouteilles et 100 crus sur un modèle d’entreprise novateur qui fait des émules. Il collectionne les bonnes idées et les médailles. Portrait d’un vigneron vaudois ouvert sur le monde.

 

Une carrière atypique. Cheveux courts, mâchoire volontaire et regard vif, Philippe Bovet, 47 ans, mène bien sa barque. Jamais à court d’idées, ce viticulteur, vigneron et caviste diplômé de Changins est aussi titulaire d’une maîtrise fédérale d’oenologie. Né au Tchad, cet enfant de Givrins, fils d’ingénieur agronome s’est forgé en vingt ans une carrière atypique qui lui vaut un succès dépassant largement les frontières suisses.

Philippe Bovet vigneron vaudois

Education ouverte. «J’ai eu la chance de bénéficier d’une éducation ouverte», affirme Philippe Bovet. Une éducation stimulante pour la créativité, encourageante pour la curiosité. Alors, il en a tiré le meilleur profit. Avide de connaissances, il a collectionné les diplômes avant d’en récolter les fruits sous forme de médailles pour ses vins. Et pourtant, rien, ou presque, ne prédisposait le jeune Philippe à la vigne.

Vignes de Philippe Bovet

Vigneron sans vignes. «Mon père avait relancé l’exploitation familiale  en 1982». Pas un vignoble, mais une ferme bicentenaire au centre de Givrins. «Très vite, j’ai réalisé que ce qui me plaisait, c’est la vigne», se souvient Philippe Bovet. Alors il a voyagé, grapillé des expériences de-ci de-là et il s’est fait un nom en dirigeant un grand domaine de La Côte. Puis il y a décidé de se mettre à son compte, à Givrins. Le problème, c’était que le domaine familial n’était pas équipé. Un seul hectare était planté en vignes: in-ren-table en l’état! A moins d’inventer une nouvelle approche. Un pari stimulant pour le jeune entrepreneur

 

Formule magique. Il a fallu quatre ans à Philippe Bovet pour trouver la solution et la concrétiser. Il a commencé par acheter un pressoir surdimensionné pour son petit hectare de vignes. Puis il a proposé à d’autres propriétaires de vinifier leurs vins. Mais pas comme dans une coopérative, où les récoltes sont mises en commun. Chez lui, chaque cru est traité individuellement, du pressoir aux cuves ou aux fûts, puis à la mise en bouteille. Une prestation novatrice il y a quinze ans qui, depuis, a fait beaucoup d’émules. Il faut dire qu’en plus d’un modèle d’affaire pertinent, c’est une formule qui obtient l’aval des banques plus propices à soutenir une entreprise du secteur secondaire que primaire.

Les cuves de Philippe Bovet

Artisan vigneron. Aujourd’hui Philippe Bovet produit 70000 bouteilles par an. Soit une centaine de vins dont 25 étiquettes «maison» faites avec les raisins du domaine et celui de vignobles loués. «En comparaison internationale, ça reste anecdotique!» affirme Philippe Bovet qui tient à son étiquette d’«artisan-vigneron» et dont les cartons portent fièrement la croix suisse sur fond rouge: «Rien avoir avec la wine industry qui vise avant tout la rentabilité. En Suisse, on ne peut pas produire à moindres frais. En revanche on peut viser la haute valeur ajoutée». Pari tenu: chaque année Philipe Bovet récolte lauriers et médailles.

Raisin

Multiples facettes. Passionné, Philippe Bovet a planté des cépages insolites, les élève avec anti-conformisme et pertinence, distille de la grappa, invente des vins pétillants, lance des vins mutés comme des portos, et lancera bientôt son givrignac, sorte de cognac local! Il exporte ses vins en France, en Belgique et surtout en Pologne: «C’est là qu’il y a des trucs à développer!». Et il participe à l’épanouissement d’un domaine en Argentine, à Mendoza. Nouveauté 2017: «Je vais tout produire en bio, mais sans le mentionner sur les étiquettes, parce qu’ici, les clients savent qu’ils peuvent me faire confiance», assure-t-il dans son vignoble, face au lac et au Mont-Blanc.

Philippe Bovet vigneron vaudois