Photos: Le Pont de Brent
Vous devez malheureusement annuler définitivement votre carte de printemps: comment faites-vous pour préparer la suivante en ces temps difficiles?
En effet, on va oublier la carte de ce printemps, et garder nos nouveaux plats pour l’an prochain! Mais pour préparer les prochaines cartes, je dirais que c’est plutôt un incroyable avantage d’avoir tout à coup autant de temps à disposition. Pour imaginer, créer et planifier, c’est le bonheur!
Quel est le produit printanier qui vous manquera le plus au restaurant, et pourquoi?
Les premiers champignons sauvages de l’année, notamment les marzuolus ou hygrophores de mars. Il est très rare (tous les trois ou quatre ans seulement) que la récolte soit assez abondante pour pouvoir le mettre à la carte du restaurant… Mais la saison des marzuolus s’annonçait exceptionnelle: nos ramasseurs nous en amenaient de superbes quantités avant cette fermeture imposée. C’est un champignon délicieux, d’une grande finesse et que j’aime autant que les bolets!
Vous êtes un grand amateur des produits du terroir. Que pouvons-nous faire en ces temps difficiles pour les petits producteurs et artisans locaux?
Cette situation est une belle occasion de redécouvrir les marchés à la ferme et tous les trésors du terroir qu’ils renferment. La proximité avec les producteurs et la traçabilité que cela amène est un gage évident de qualité et de sécurité.
Pour donner un exemple, je travaille beaucoup avec Laetitia Roset, des Jardins du Closy à Puidoux. Son petit marché à la ferme ne désemplit pas depuis le début du confinement, et je me réjouis que des personnes aussi méritantes puissent bénéficier de la situation! Mais le gros problème de cette agriculture de proximité est de trouver la main-d’œuvre qui leur permet de continuer de proposer de si beaux produits. Car ces agriculteurs ne manquent pas d’idées ni d’envies et avec une main-d’œuvre qualifiée et motivée leurs possibilités seraient incroyables.
Allez-vous profiter de ce temps pour remplir un peu votre blog?
Oui, c’est prévu! Je viens déjà de lancer l’édition 2020 de mon concours «Une Histoire de Cuisine…», réservé aux cuisiniers amateurs. Et je me réjouis d’avoir à nouveau le temps d’écrire sur ce blog!
Que devez-vous gérer pour le restaurant?
Les premiers jours ont été très chargés, mais c’est mon épouse, Stéphanie, qui fait un énorme travail de ce côté-là. Il a fallu faire les démarches pour le chômage de nos collaborateurs, trouver des arrangements pour le loyer, la banque, etc. Le plus difficile à vivre, ces jours, c’est l’incertitude concernant l’avenir de notre entreprise…
Vous avez pas mal de temps à disposition. Qu'en faites-vous?
J’essaie de faire abstraction des choses sur lesquelles je n’ai aucune emprise, mais de profiter pleinement de cet «arrêt sur image». Passer du temps en famille, lire, réfléchir, cuisiner pour le plaisir et s’octroyer de temps à autre une balade dans la nature afin de cueillir quelques herbes et champignons.
Il faut bien dire qu’avec la vie que l’on mène, c’est une chance de se retrouver avec autant de temps libre à disposition! Il faut donc en profiter pour réfléchir, penser et rêver notre avenir…
Votre recette de cuisine «spéciale confinement»?
J’adore les tartes aux fruits, alors je dirais une tarte aux poires et à la cannelle! Mais je profite également de faire du pain au levain, des plats mijotés, des pâtes fraîches, etc. Il y a tant de choses à faire!
Un détail à ajouter?
Etant membre du comité international des chefs Relais & Châteaux, j’ai eu ces derniers jours l’occasion d’échanger avec des collègues du monde entier. Ces échanges m’ont permis de me rendre compte de la chance d’évoluer dans un pays avec un système de santé et des institutions solides et fiables. Le monde entier est confronté à cette pandémie, avec les problèmes qui s’ensuivent, et tous n’ont pas notre chance…