Photos: Lucia Hunziker
Lunettes design et cheveux soigneusement attachés, Tanja Grandits est, à 49 ans, une cheffe épanouie. Menue, elle a l’accent typique de l’Allemagne du Sud, où elle est née. Au restaurant, elle se présente toujours sanglée dans un sobre tablier noir. Mais de son imagination et de ses mains naissent des plats colorés, inspirés et épicuriens. Elle aime l’Asie et cela se voit dans ses assiettes. Exploratrice, elle a devancé les tendances nordiques, sublimant les végétaux avant tous les autres. Perfectionniste, elle n’hésite pas à enduire ses mains d’huile d’orange sauvage avant un dressage, qui s’en trouvera nimbé d’un imperceptible parfum: le détail qui fera la différence. Oui, Tanja Grandits est une artiste. Même Roger Federer est tombé sous le charme.
Le GaultMillau avait découvert Tanja en 2001, à Eschikofen, en Thurgovie. Depuis, ce petit bout de femme énergique et déterminé n’a pas cessé de se dépasser: «Je ne me suis jamais fixé d’objectif, je me fie à mon intuition.» Bien vu: pour la deuxième fois (!), elle remporte le titre de «Cuisinier de l’année». Mieux, elle est la première femme à obtenir 19 points. Le tout dans le cadre emblématique du restaurant Stucki, à Bâle.
Le restaurant de Hans Stucki est à la Suisse alémanique ce que l’Hôtel de Ville de Frédy Girardet à Crissier est à la Suisse romande: une légende. Et sa belle demeure, sertie dans la verdure d’un quartier huppé de la cité rhénane, semble porter chance à celle qui, fraîchement honorée, poursuit son œuvre d’excellence: «Je suis folle de joie!» rayonne Tanja Grandits, aux côtés de Marco Böhler, son chef: «Le meilleur», dit-elle.
Ensemble, ils réalisent au quotidien des miracles culinaires. L’inspiration, Tanja la trouve souvent le matin, chez elle, pendant son heure de yoga. Dans l’air flotte un parfum de basilic et de limette. Et par les fenêtres le soleil caresse Norma, le bouledogue français. Cérébrale (elle avait entrepris des études de chimie), c’est là que la cheffe associe maquereau et thé vert, langoustine et grapefruit, curry et fleur d’oranger. L’exploration est sa passion.
Artiste et créative, Tanja est surtout conséquente. Le foie gras, elle n’en sert pas, rebutée par la souffrance animale. Le «convenience food», elle n’y touche pas: «C’est incompatible avec mes valeurs gustatives.» Hors cuisine, elle s’engage comme ambassadrice de Terre des hommes: «Car tout le monde n’a pas eu autant de chance que moi.» Et en tant que mère d’Emma, 14 ans, elle s’attache «à lui donner la confiance en elle, comme moi». Serait-ce là sa recette du succès?
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Stucki / Tanja Grandits
Bruderholzallee 42
4059 Bâle
+41 61 361 82 22