Texte: Knut Schwander Photos: Sedrik Nemeth
Chef transmuté. Orfèvre des dressages et alchimiste des saveurs, Didier de Courten l’avait annoncé : son restaurant allait changer de formule. Puis, le Covid est passé par là, annulant la soirée de clôture réservée des mois à l’avance et repoussant encore et encore l’ouverture de cet Atelier Gourmand nouveau que la planète gastronomique se réjouissait de découvrir. Depuis quelques jours, ça y est! La terrasse bruisse du babil des gourmands. Une brigade de service diminuée de moitié, mais charmante et spontanée, virevolte avec des plats affriolants. L’ancienne brasserie a gagné en personnalité et la grande salle garde toute son élégance. Le chef, lui, paraît en forme olympique.
Etincelles dans les yeux, magie dans les assiettes. En ce début juin, Didier et Carmelina de Courten sont resplendissants de joie de vivre et d’énergie. A l’évidence leur projet les porte. Au point que – ça n’échappe à personne – le chef fait à présent son tour de salle et discute avec les clients. Une révolution! La formule « simplifiée » de ses assiettes lui laisse plus de marge et de temps. Pour les convives, la prestation n’en reste pas moins magique. D’autant plus que les prix (36 francs le plat du jour, 120 francs le grand menu du soir) ont de quoi faire réfléchir la concurrence.
Menu de printemps. La formule donc, c’est par exemple ce carré d’omble surmonté d’une gelée d’oranges, escorté d’une fine brunoise de courgettes bicolore à la vinaigrette de lavande. Ou encore cette truite saumonée des Grisons en émulsion divine à l’estragon, herbe du dragon et verveine. Puis viennent les exquis losanges de piperade aux asperges blanches et vertes, le tout parfumé au sureau et agrémentés de bâtonnet de jambon cru. Le duo de gamberi rossi à la bergamote arrive avec un risotto croustillant, nappé d’une bisque sublimissime : à St Moritz, ce même plat coûterait sans doute le prix du menu ! La raviole de morilles et poireaux en émulsion de vin des glaciers est délicate et le filet de boeuf aux myrtilles magnifique avec sa sauce à l’aspérule odorante. Les fromages sont désormais servis sur assiette, mais choisis avec attention.
La simplicité selon Didier de Courten. C’est ça que le chef appelle « simple »? Oui, et il faut rendre hommage à sa transparence. Bien entendu, cette simplicité-là n’est pas celle d’une brasserie traditionnelle. Mais le chef concilie avec brio la motivation de sa brigade de cuisine enthousiaste, sa quête intacte d’une forme de perfection culinaire et une rationalisation de son concept. Désormais il apprête des produits de qualité, mais moins extravagants et ils sont servis avec moins de décorum. Demeurent les dressages, complexes, qui rappellent furieusement le DDC d’avant. Chassez le naturel…