Culture bouillon. La bouillon-mania va-t-elle s'emparer de la Suisse romande? Un restaurant de ce type a ouvert ses portes début octobre à Prilly (VD): le Bouillon Fleur-de-Lys. Au menu: cuisine simple et régressive proposée à tout petit prix. Les bouillons, ce sont ces restaurants typiquement parisiens nés au XIXe siècle. Le tout premier a été inauguré en 1854 par un boucher, Alexandre Duval, qui eut l'idée de valoriser les bas morceaux de ses carcasses pour agrémenter et servir des bouillons (liquides, ceux-là) bon marché aux ouvriers des Halles, dans la capitale française. Le succès fut tel qu'en 1900, la ville comptait 250 bouillons Duval, qui était alors la toute première chaîne de restaurants populaires du monde! D'autres leur ont emboîté le pas, dont le fameux bouillon Chartier, toujours ouvert. Et toujours plein.
Le point commun à tous les bouillons? D'immenses salles (fort) animées aux miroirs Art nouveau, un service éclair, une cuisine conviviale et sans chichi: les bouillons sont l'essence même des restaurants populaires. Tombés en désuétude au XXe siècle, ils reviennent en force depuis quelques années - à la faveur de l'inflation, mais aussi d'une nostalgie de la bonne vieille cuisine d'antan. À Paris, plusieurs dizaines de bouillons ont ouvert ces dernières années, dont certains tenus par d'illustres chefs tels que Thierry Marx à Saint-Ouen ou encore Philippe Chevrier et son Monsieur Bouillon à Genève (cédé depuis).
Cuisine de grand-mère. Sis dans la piscine de Prilly, le Bouillon Fleur-de-Lys remplace le Mamacita, brasserie atypique aux accents mexicains. Les gérants et l'équipe restent les mêmes. Ce serait à notre connaissance le premier et le seul restaurant à revendiquer le nom de bouillon, du moins dans la région. Pari tenu? Pour nous, oui: on y mange effectivement des plats aussi simples que réconfortants, qui démarrent à une quinzaine de francs. «Je voulais proposer quelque chose de convivial et abordable, et nos vues se sont alignées avec la ville de Prilly, qui voulait que l'endroit reste accessible aux familles», relate le propriétaire Laurent Jaccard, qui sourit: «Et puis, j'aime la cuisine de grand-mère».
Ça tombe bien, nous aussi. Jetons un œil à la carte: boissons dès 3 francs (café à 2,90 francs), entrées à partir de 3,20 francs (!). Les plats du jour (2 chaque semaine, plus un plat qui reste un mois) sont vendus de 15 à 17 francs. Pratiquement tout est fait-maison, même les frites et les desserts. Les légumes proviennent notamment de la ferme bio voisine à Jouxtens, et la viande de la boucherie Lipka, à Vevey. «Le fait-maison, c'est obligatoire pour maintenir des prix bas», assure Laurent Jaccard. Et ce dernier de glisser qu'il aurait souhaité descendre encore les tarifs. C'est encore un peu trop risqué à ce stade selon ses dires, même s'il ajoute que plusieurs prix ont déjà été revus à la baisse.
Comme à Paris (tenu). Aux fourneaux, c'est le chef Thierry Daste qui officie. On opte pour une soupe à la courge en entrée, un peu trop salée, ce qui efface le cucurbitacée. Cela va mieux avec les endives gratinées au jambon, bien cuites et qui conservent juste ce qu'il faut de fermeté. La portion est copieuse, avec une belle quantité de fromage fondu qu'on nous suggère de déguster à la cuillère et avec de généreuses tranches de pain tout à fait honnête. On ne va pas se le faire dire deux fois. Côté déco, l'endroit ressemble encore à un steakhouse plus qu'à un authentique bouillon, mais il sait rester confortable. Laurent Jaccard confirme que c'est sur sa liste: «On va ajouter des miroirs et changer la déco pour donner un style de bouillon parisien.» Une belle adresse populaire qui sert une cuisine honnête à prix modique: le Bouillon Fleur-de-Lys a réussi son pari d'importer en Suisse ce concept bien français. Et ce sans boire le bouillon!
BOUILLON FLEUR-DE-LYS
Sentier de la Fleur-de-Lys 4
1008 Prilly
Restaurant Bouillon Fleur-de-Lys à Prilly
HORAIRES:
7 jours sur 7, 11h30 - 14h30 et 17h30 - 23h (minuit les vendredis et samedis)