Coup de maître. En deux ans, le Fiskebar s’est imposé comme LA table où le Tout-Genève se précipite. Décor hyper-tendance et sens de l’accueil érigé en art viennent booster ce succès. Mais surtout, les plats explorateurs de Benjamin Breton font chavirer tous les convives. A 26 ans, fine moustache et regard intense, le chef d’origine corse a fait de l’inspiration «scandinave» du Fiskebar sa signature. Unique.
Et pourtant, il doute: «Je ne suis jamais pleinement satisfait», avoue Benjamin. «C’est en analysant ses erreurs que l’on avance»: lucide, ce jeune chef! Alors il ne se contente pas d’avancer, il fonce. Car ce fils de deux bons vivants, né au centre de la France, a toujours adoré manger, mais il a du temps à rattraper. A l’âge de 10 ans, en effet, il tombe malade: pendant cinq ans, il navigue entre la maison et l’hôpital, avec des privations sévères côté alimentation: «C’est ce qui a exacerbé mon appétit!» A peine remis, il fait un stage en cuisine: «Là, j’ai compris que c’était ça que je voulais faire!»
16/20 en deux ans. A l’évidence, il avait vu juste. Sa cuisine? Elle est graphique, délicate, exploratrice: «Céleri en rosace, confit tel un bonbon dans de la graisse de canard infusée au girofle et surmontée de truffe noire», relève le GaultMillau 2020 en évoquant une «sauce étourdissante» et la «montée en puissance d’un jeune chef qui fera sans doute encore parler de lui». Mais à l’époque, ses parents l’imaginent plutôt aux études: on les comprend, car, en plus d’être un cuisinier passionné, leur fils pétille d’intérêts.
Multi-talentueux. En fait, Benjamin Breton est féru de tout, il ne lui manque que du temps pour concilier ses horaires avec ses multiples centres d’intérêt: photographe à ses heures, il adore la littérature, et se consacre volontiers à l’art moderne: «Des domaines d’activité liés à l’art et à la création, donc similaires à ce que je fais», relève Benjamin qui aime que ça bouge: «Le lycée hôtelier, je n’ai pas aimé: je voulais cuisiner, pas passer mon temps assis sur une chaise.» Alors, Benjamin se lève et, depuis, il a mis le turbo.
Carrière éclair! En apprentissage chez Ludovic Laurenty, à La Maison d’à Côté (une étoile Michelin), il obtient son brevet en un an et, très vite, il passe sous-chef. Puis il rencontre son homonyme, Benjamin Luzuy. Ensemble, ils lancent les Bottle Brothers: un, deux, trois, puis quatre restaurants! Puis il croise le chemin de Pierre Lelièvre qui met en route le Fiskebar du Ritz-Carlton Hôtel de la Paix, à Genève: «Un vrai coup de foudre amical et professionnel». Benjamin fonce et reprend les cuisines avec deux de ses compagnons de route: «On s’est approprié la carte, plus courte, et on a misé sur un menu «Inspiration» qui permet au chef de surfer au jour le jour sur les arrivages et ses inspirations.»
Repas inoubliables. Au Fiskebar, avec Samuel, le chef de salle, ils regorgent de projets: «Soigner la scénographie, raconter des histoires, transmettre des émotions afin que chaque repas, aussi éphémère soit-il, se mue en souvenir inoubliable». Mais Benjamin vise déjà plus loin: «Etre chez moi, dans une vieille ferme par exemple, en autosuffisance avec un jardin, des bêtes, des œufs frais… idéalement à 30 minutes de Genève, par exemple. J’aimerais créer une destination, avec des chambres.» En attendant, le chef collectionne les bonnes tables: Mazzia à Marseille, Frédéric Molina sur la route de Thonon, Sang-Hoon Degeimbre près de Bruxelles: «La plus grande claque que j’ai jamais prise!» En attendant la suite, à Genève, c’est chez Benjamin que les convives tombent sous le charme.